Sache, 0 prince, qu'entre les années où les critiques engloutirent Kirby
et ses incommensurables héros et celles qui virent l'avènement
des fils de Claremont, il y eut un âge de rêve.

Tel un brillant manteau à étoiles, de fulgurants artistes couvrirent le monde : Neal Adams nous contait la chronique des Spectres vengeurs. Les Buscema exilaient un Surfer désespéré sur la planète bleue, Starlin, dans sa dimension cosmique et transcendentale, n'avait pas d'égal.

Alors vint Barry Windsor Smith, l'anglais à la crinière sombre et aux moustaches tombantes, une plume à la main. Dessinateur, scénariste, peintre, coloriste, il allait créer des trônes incrustés de joyaux et des chevaliers mythiques sous son crayon à papier.

(Chroniques marvelliennes)

Ecoutez-moi ! Compagnons mercenaires et mécréants,
je vais vous conter en cette chaude nuit de fin d'été l'histoire d'un conquérant. Son nom sonne comme le tranchant d'un bon acier hyrcanien :

Comme moi, il est né dans une lointaine et sauvage contrée oubliée des dieux hyboréens l'Angleterre. Depuis sa plus tendre enfance, il espérait conquérir son trône d'Amérique le pays ressemblant en de nombreux points à notre chère Aquilonie. Le parcours pour atteindre sa terre promise fut long et parsemé d'embûches mais sa farouche détermination et le soutien son Dieu LEE, lui permirent de triompher.

C'est en ces termes que le personnage de Robert E Howard, Conan, aurait pu débuter le récit des aventures de celui qui allait l'immortaliser au pays du comics book.

Il est vrai que, dés 1968, notre petit Barry Smith (Windsor ne viendra que bien après), qui n'a pas encore 20 ans mais reste déjà très sûr de ses capacités, expédie à Stan Lee des planches et esquisses qu'il réalise d'après les personnages du maître lui-même (cf. poster paru dans Scarce 12). Stan Lee, plus condescendant que Crom, et pensant très certainement qu'aucune suite ne lui serait donnée, écrit à Barry que son travail ne manque pas d'intérêt et que, le jour où il envisagera de venir aux Etats-Unis, une collaboration pourra être considérée. Comme un jeune cimmérien, Barry Smith n'écoute que son sang fougueux et s'embarque sur la première galère en partance. Dés son arrivée en terre promise, il se présente à Stan Lee qui, devant le fait accompli, ne se rétracte pas et propose divers travaux au nouveau venu.

 

Parcours initiatique

Dés février 1969, Barry Smith réalise X-Men 53 ( Strange 54 -juin 1974 ) sur un scénario d' Arnold Drake , dans lequel un vilain du nom de Blastaar , habitant de la Zone Négative, vient troubler une expérience des pupilles du Pr. Xavier. Nos braves jeunes mutants, déjà bien turbulents, lui mettent la pâtée pour qu'il ne recommence plus et Blastaar regagne ses pénates, la crinière entre les jambes. Il est à noter que les bons, dans cette histoire, ne se mettent qu'à cinq contre un, ce qui est bien normal lorsqu'il s'agit de renvoyer un étranger dans son pays... oups pardon ! dans sa dimension.

Le graphisme de Barry Smith, encré par Michael Dee , présente un énorme avantage à cette époque.

Il rompt la monotonie et la fadeur dans lesquelles les X-Men stagnaient sous le crayon de Don Heck et Werner Roth . Dans le courant de l'année 1969, il dessine également Nick Fury , Agent of Shield 12 ( L'Inattendu 23 -Aredit pocket ), sorte de James Bond américain combattant une organisation secrète, l'Hydre, et Daredevil 50 à 52 (Strange 49 à 51). Le scénario, de Stan Lee et Roy Thomas , reste assez simple, pour ne pas dire simpliste :

Daredevil combat un méchant robot créé par un mystérieux savant (fou ?) pendant qu'une brouille le sépare de son ami et associé, Foggy Nelson, et que sa secrétaire, Karen Page, se meurt d'inquiétude et d'amour pour lui (torride et original, non !!).
L'histoire va s'intensifier avec l'arrivée de Roy Thomas qui nous révèle que Matt/DD est atteint d'une grave maladie du sang (ce qui permet à l'horrible savant de découvrir l'identité secrète de Daredevil), introduit The Black Panther et, pour finir, laisse Karen Page découvrir l'identité de DD dont le caractère secret se trouve quelque peu entamé (!).

Concernant le graphisme, une évolution est déjà décelable par rapport à son travail sur X-men 53 . Si le style est encore simple, à la limite du linéaire, on note une fluidité allant jusqu'à la déformation (Daredevil 52, planches 2 et 3), influence de Jack Kirby indéniable sans pour cela faire de lui un vulgaire sous Kirby connue il se plait à le déclarer lui-même aujourd'hui. Deux mois après son bref séjour sur Daredevil , nous retrouvons Barry Smith sur Avengers (66-67) où, avec Roy Thomas , nous est relatée la première apparition de Ultron-6. Aidés du Shield , les Vengeurs affrontent et réduisent la menace. Là encore, l'influence de Kirby reste prépondérante.

"QUE LA CHANCE SOIT AVEC TOI"

Durant son séjour aux USA, Barry Smith ne devait pas dessiner uniquement que du super-héros. Et, c'est là qu'intervient sa chance.
Début 1970, il signe "The Sword and the Sorcerer" publié dans "Chamber of Darkness" ( L'Inattendu 10 ). Le scénario est de Roy Thomas et mêle allègrement le fantastique et l'heroïc-fantasy : le héros n'est pas un barbare aux muscles saillants mais un romancier contemporain qui rédige ses histoires après les avoir rêvées ; lassé de devoir "pondre" des nouvelles pour faire face à la demande et au succès, il décide de mettre fin à la vie de son héros mais se fait trucider par ce dernier avant que sa nouvelle finale ne soit publiée. Cette apologie de la légitime défense, rééditée dans L'Echo des Savanes Spécial USA 7 , contient déjà tous les éléments graphiques du futur Conan et Roy Thomas ne s'y trompe pas.
En effet, à cette époque, Marvel veut lancer sur le marché une nouvelle bande dont le héros ne serait autre que Conan le cimmérien , personnage le plus connu de Robert E. Howard , et seul le choix de l'artiste semble poser problème ( cf interview de Roy Thomas parue dans Scarce 15 ). Un moment pressenti, Big John Buscema sera écarté in extremis au bénéfice de Barry Smith choisi par Roy Thomas.
En 1981, dans une interview publiée par Le Collectionneur de BD (n°32) , c'est non sans un certain humour que Barry affirme : Conan a eu du succès bien que j'ai été à l'encontre des idées de Stan Lee...

L'âge d'or

Roy Thomas imposa Barry Smith au seul vu de "Sword and Sorcerer" contre l'avis de Stan Lee qui jugeait le style de l'artiste comme manquant de dynamisme.

En regardant les 20 épisodes qu'il réalisa, il faut reconnaître que c'est durant cette période que le génie prendra réellement son essor. Roy Thomas, dans la préface qu'il rédigea pour la réédition de " Red Nails " (en France, " Les Clous Rouges "), Conan Spécial Edition 1, le déclare avec humour : Personne, même pas Barry lui-même, ne pouvait savoir qu'en l'espace de quelques numéros de Conan le jeune maître Smith deviendrait l'Alphonse Mucha du comics.

Le premier numéro sort en octobre 1970 et l'encrage de Dan Adkins , vieux routier qui a réalisé de fameux épisodes de Dr Strange, accroît le jeu d'ombres et de lumières de Barry Smith, tout eh en atténuant le côté "déformation Kirby".

Ce numéro ne recevra qu'un accueil d'une chaleur mesurée auprès des lecteurs américains trop habitués aux récits de super-héros aux pouvoirs hyper-développés.

Avec Conan the Barbarian 1, Thomas et Smith posent les grandes lignes qui caractérisent encore aujourd'hui la série, demeurant en cela relativement fidèle à l'esprit insuflé au personnage par son légitime créateur. L'histoire débute en plein combat, sans qu'aucune cause n'en sait donnée au lecteur. Seule la bataille doit compter, tout comme elle compte pour Conan uniquement préoccupé par l'instant présent, un Conan dont on s'aperçoit très rapidement qu'il ne réfléchit guère au pourquoi et au comment. On doit pleinement jouer le jeu de l'identification. Dans ce récit, on découvre Conan , un personnage prompt à commander et tout aussi prêt à se vendre au plus offrant, en bon mercenaire qu'il est. On notera que ces traits de caractère seront censurés durant la collaboration du trio Lee/Thomas/Smith (difficile de donner en exemple aux jeunes un héros aussi vénal et totalement dépourvu de scrupules !).

Le second numéro sort en décembre 1970, encré cette fois par Sal Buscema (le petit frère de l'autre) qui deviendra, en quelque sorte, l'encreur attitré de Barry Smith. En effet, sur la vingtaine d'épisodes de Conan signés par Thomas et Smith, il en encre là et continuera d'"embellir" le graphisme de Barry sur les séries que celui-ci dessinera par la suite, comme Avengers ou les aventure de Ka-Zar parues dans Astonishing Tales . Prendre chaque épisode de Conan et en détailler l'évolution n'est pas possible, un article entier serait nécessaire. Nous renvoyons donc le lecteur, qui pourra se fonder un jugement par lui-même, au tableau détaillé figurant en encadré. Mais nul n'est besoin d'être grand expert pour se rendre compte que l'approfondissement du personnage va de pair avec raffinement du trait : Conan et Barry Smith progressent ensemble.

Dans le n°4, "Tower of the Elephant", le dessin de Smith force l'admiration par sa perfection des détails (décors de la tour, jeux d'ombres et de lumières dans la taverne). Parallèlement, l'histoire s'étoffe : Conan rencontre une divinité au corps d'homme ailé et à tête d'éléphant réduit en esclavage par un nécromant peu sympathique. C'est en tuant le dieu difforme que Conan le libère de son joug et lui permet de se venger de son tortionnaire. Le temps d'écraser une larme et Roy Thomas reconnaîtra cet épisode comme étant son préféré (est-ce parce qu'il s'agit d'une très fidèle adaptation d'une nouvelle de Howard ?!). Pourtant d'autres épisodes demeurent des sommets de perfection et de réussite :

  • la rencontre inattendue entre les deux monstres sacrés de l'heroïc-fantasy, Conan et Elric le Nécromancien, ce dernier héros de Moorcock (Conan 14-15) ;
  • la Guerre Sainte du Tarim entre les villes états de Turan et Makkalet (Conan 19-20) ;
  • la destruction totale des deux factions de la cité de Xuchotl ("Red Nails" dans Savage Taies 2-3) ;
  • et surtout la rencontre fracassante entre Conan et Red Sonja (Conan 24), laquelle ne sera jamais plus aussi sexy sous la plume d'un autre artiste. On rappellera que cet épisode, haut en couleurs, obtint l'ACBA Award, label du meilleur comics book, pour l'année 1972 (Barry Smith ayant déjà été désigné, l'année précédente, comme le meilleur nouveau talent étranger).

On peut également relevé quelques autres épisodes qui seront redessinés et republiés dans Conan ou Savage Sword of Conan, par exemple le déjà cité "Tower of the Elephant" (réédité dans le King Size 1 de 1973) ou "The Frost Giant's Daughter" (initialement paru dans Savage Tales 1 mars 1971, puis repris, sous une forme moins ...érotique, dans Conan 16 juillet 1972, avant de figurer au sommaire de Savage Sword of Conan 1 août 1974 ; si vous ne connaissez pas au moins cette histoire, vous êtes impardonnables !).

Durant cette période faste, Barry Smith, tout en dirigeant la destinée de Conan, intervient en parallèle sur des personnages Marvel aussi bien confirmés que nouvellement promus au rang de super-héros. Ainsi réalise-t-il pour Astonishing Tales, de décembre 1970 à février 1972, cinq épisodes du Tarzan maison, KaZar.

Astonishing Tales, magazine regroupant deux histoires, vient de naître et publie, d'une part, les aventures du plus formidable des super-vilains, "Dr Doom" qui accède au statut de héros sous le pinceau séduisant de Wallace Wood, et, d'autre part, Stan Lee et Jack Kirby donnent à Ka-Zar, second rôle dans diverses séries, sa propre bande.

Barry Smith, accompagné de Gerry Conway au scénario, prend la suite et, alors que notre homme de la jungle rentre fatigué après une rude journée (il vient d'expliquer à Kraven qu'il n'est pas très gentil de vouloir s'en prendre à son minet...), il trouve dans son appartement (en l'occurence, Ka-Zar n'est pas à Savage Land, on l'aura deviné !) Garokk, l'homme pétrifié, qui deviendra par la suite Sun God en prenant conscience de son pouvoir.

C'est le début d'une superbe saga au sein de Savage Land (vous suivez toujours ?), pleine de bruit, de fureur, de princesses sexy chevauchant de monstrueux ptérodactyles, et de demi-dieux prônant la paix et bien décidés à détruire Savage Land toute entière pour l'obtenir. Heureusement, Ka-Zar et son inséparable Zabu (le gros matou sur lequel Kraven eut précédemment quelques vues) veillent et tout finira par rentrer dans l'ordre (ouf !).

Abandonnant Ka-Zar à Harb Trimpe, un dessinateur sous-apprécié et qui pourtant poursuivra cette série avec un certain brio tout en lui conservant pendant quelques numéros son intérêt, Barry Smith va s'afficher quelque temps avec The Avengers où il poursuit sa fructueuse collaboration avec Roy Thomas (il est vrai que l'année 1972 est particulièrement marquante pour cette série qui verra également le Neal Adams des grands jours dessiner quelques épisodes).

Goliath a disparu. En réalité, Clint Barton (alias Hawkeye), qui a repris le rôle de Giant Man au sein des Vengeurs après la disparition de Hank Pym, est retrouvé dans un vaisseau rempli de Skrulls. Privé de ses capsules de sérum qu'il utilise pour modifier sa taille, il se confectionne, à l'aide d'un élastique et d'une barre de fer (!!), un arc rudimentaire mais semble-t-il suffisamment efficace puisqu'il parviendra à éliminer les méchants avec une facilité déconcertante (décidément, ces héros américains sont plein de ressources et de talents cachés ! ). De retour sur Terre, il tombe sur un Hercule amnésique et le ramène parmi les Vengeurs qui, faute de mieux sans doute, se tapent dessus entre eux à bras raccourcis. Objet de cette discussion enflammée : un point d'idéologie pro-guerrière que répand un groupuscule dirigé par Ares. Bref, cette joyeuse assemblée est tout ce qu'il y a de plus charmant...

Avengers 100 nous livre six premières planches superbes encrées par Barry Smith lui-même et décrivant la réunion des Vengeurs du moment au rand complet (autant dire que ça déborde de tous les côtés !) en prévision de l'invasion de l'Olympe afin de tirer Hercule des pattes d'Ares. Dés Juillet 1972, Barry Smith fait renaître Dr Strange (disparu depuis novembre 1969 et récemment remis au goût du jour avec l'apparition des defenders dans Marvel Feature 1 décembre 1971), maître incontesté des arts mystiques de la galaxie Marvel, Dr Strange qui va se produire, pour commencer, dans les pages de Marvel Première.

Sur un scénario de Stan Lee, le graphisme tourmenté de Smith rappelle la première époque du personnage, celle de Ditko et de ses fameux univers parallèles gui avaient tant fasciné la génération "psychédélique".

L'influence de Dr Strange a-t-elle poussé Barry Smith à passer dans une autre dimension ? Toujours est-il qu'à partir de ce moment, et hormis un numéro de Iron Man 47 (Strange 46) et un autre, plutôt lamentable, de Daredevil encré par Bill Everett (83 -Strange 81), Barry Smith disparaît du monde des comics.

L'exil

Barry Smith a disparu du monde des comics et le fan moyen de super-héros se sentant trahi et lâchement abandonné se désintéresse de ses parcimonieuses créations.

Pourtant, Barry Smith crée sa propre maison d'édition, Gorblimey, pour laquelle il réalise quelques bandes au graphisme magnifique mais dont les scénarios pèchent par leur évanescence et leur déliquescence (termes qui conviennent tout à fait à un style raffiné mais pompeusement prétentieux). On peut citer à titre d'exemples, "La Séductrice" (paru dans Epic 6, version française Aredit) et "La Voie Etoilée" (Epic 7, toujours chez Aredit). Il convient tout de même d'admirer l'artiste complet qui travaille sur ses propres récits ou des scénarios qu'il adapte, dessine et encre totalement ses créations et les met en couleurs de la plus remarquable façon.

C'est à cette époque qu'il devient manifeste que Barry Smith aime à réaliser toutes les étapes concourant à la réalisation d'une oeuvre.

Plus tard, le Fandom apprend que son artiste chéri s'est associé à trois autres compères dont les noms ne sont pas inconnus mais ne figurent pas ou plus sur les tables d'or des deux grandes compagnies, Marvel et DC.

Cette association débouche sur la création de " The Studio" avec Jeff Jones, disciple et héritier de Frazetta, Mike Kaluta, rénovateur et révélation du Shadow de DC, et Berni Wrightson (évoqué dans ce même numéro et dans Scarce 12). Leur travail s'apparente beaucoup plus à de la recherche artistique et à la création d'œuvres picturales (souvent d'une grande beauté, au demeurant) qu'à la simple narration d'un récit. Durant toute cette période, son oeuvre se résume à de splendides portfolios aux tirages très limités et aux prix exorbitants. Peuvent être recensés : trois portfolios consacrés aux personnages de Homard (l'un étant d'ordre général, les deux autres principalement axés sur Conan) ; un Excalibur et un Fantastic Islands.

Concernant les deux Conan, respectivement de 4 et 6 planches, signalons que le premier parut en couleurs (contrairement au second publié en noir et blanc) ; tous deux montrent le cimmérien dans diverses positions plus ou moins belliqueuses. Ces oeuvres sont aujourd'hui, et particulièrement en France, des pièces rares qui, tel le Nécronomicon, ne sont portées à la vue que d'initiés. Le portfolio Excalibur, appelé à tort ou à raison le plus petit portfolio du monde, contient 6 "planches", d'un format de cartes à jouer, reprenant les 6 personnages principaux de la chanson de geste des chevaliers de la Table Ronde : le roi Arthur, Guenièvre, Lancelot, Merlin (enchanté !), Elaine et Galaad. Cette pièce est peut-être aujourd'hui une rareté mais, pour notre part, nous n'avons eu à l'époque (1980) de difficultés pour l'obtenir ; alors... Enfin, Fantastic Islands, d'un format assez particulier (environ 20x60 on), se constitue de 4 planches représentant des guerriers dans ii poses différentes. De nombreux posters et sérigraphies sont également sortis mais Barry Smith a, semble-t-il, décidé de s'"économiser". Comprenant qu'être trop prolifique entraînait la dévalorisation de l'artiste et de son oeuvre, notre londonien à pécher par excès inverse, allant jusqu'à fréquenter les conventions et festivals mais refusant toute dédicace ou concédant uniquement quelques signatures.

RENAISSANCE

Enfin, début 1984, une grande joie !! Marvel annonce le retour de l'enfant prodigue au sein du monde du comte et un spécial X-Men est donc prévu sans plus de précision quant à sa date de parution. En fait, Barry Windsor-Smith réapparaît sur une touche humoristique, dans Marvel Fanfare 15 et pour un travail très particulier mais très original dans la façon de voir la vie quotidienne des Fantastic Four, qui plus est, à une date charnière de leur carrière : un 1er avril...! Thé Thing au lever du matin vaut le prix du comic à lui seul et le faciès barbu du neveu de tante Pétunia est digne de figurer dans le palmarès de tous les festivals fantastiques du Rex. Alors, ne vous privez pas d'une petite gâterie... Pour redevenir sérieux, l'attente de l'épisode de X-Men durera jusque pendant l'été 84 qui voit la parution de X-Men 186 (album X-Men "dieuTornade", en France). Dans ce numéro, Claremont et Smith nous content le désespoir de Storm dépossédée de ses pouvoirs et soignée par Forge.

Barry Smith, encré pour cette fête par Terry Austin, s'en donne à coeur joie dans la recherche du détail et du décor (aidé en cela par le fait que Forge habite dans un appartement démentiel décoré par hologrammes programmés). L'épisode se termine par une explication orageuse entre les deux personnages, au milieu d'une tornade dont Barry Smith s'est délecté à détailler jusqu'à la moindre goutte de pluie, au grand plaisir du lecteur.

L'attente du Smith suivant est très courte car, quelques semaines plus tard, la mini-série Machine Man (paru chez Lug dans la collection "Un Récit Complet"). Sur un scénario très sf et parfait de Tom DeFalco, herb Trimpe (dessinateur) et Barry Smith (encreur) redonnent vie à Machine Man. Ne vous lamentez pas pessimistes impénitents ! Malgré le fait que Barry Smith ne soit qu'encreur sur les trois premiers numéros, sa patte seule est apparente et la différence avec le n°4 (dont il assure l'entière conception graphique) reste négligeable. Machine Man, c'est la renaissance du génie de Barry Smith ; c'est la pure réussite, aussi bien au niveau de la mise en page et des cadrages que des couleurs et de la finesse du trait.

Suite à une erreur au sein de l'usine Baintronic Inc, le container dans lequel Machine Man avait été mis au rebut est balancé dans une décharge où des pilleurs-chiffonniers légèrement anarchistes le récupère. Réactivé, Machine Man, retrouve ses vieux amis et, ça fait partie du lot, ennemis, son ancienne "girlfriend" Oocaste, ex-Avengers et également robot), rencontre Iron Man version 2020 à qui il met une toise (histoire de lui prouver la supériorité de la machine sur l'homme !), fait la révolution et repart cultiver son jardin...

Rien à dire ! On reste soufflé par la beauté de certaines planches : du grand Art.

Fin 85, Barry Smith revient avec X-Men 198 (Spécial Strange 52), un spécial Storm dans lequel la déesse déchue se penche sur les affres de la misère en Afrique. Episode largement décevant, mais beaucoup moins que les deux pages réalisées pour le Heroes against Hunger de DC qui le voit associé àJeff Jones (dont le généreux -lourd ? encrage noir littéralement la finesse du trait). Quelques mois passent, puis c'est Wolverine qui devient la cible de Barry Smith (X-Men 205 escamoté de la version française). Malgré un dessin un peu trop fouillé, pour ne pas dire fouillis, et des couleurs baveuses, le combat final entre Logan et Yuriko, d'une rare violence, est une réussite totale. Nouvelle attente récompensée, fin 86, avec la parution, coup sur coup, de Daredevil 236 (superbe ! ) et 5 planches dans Fantastic Four 296 (numéro-anniversaire qui fête les 25 ans de la maison et du groupe -à voir pour se rendre compte de ce que peut être une Chose aux yeux bleus désespérés sous la pluie ; personnes sensibles, s'abstenir !). Retour sur X-Men (214), début 1987, bientôt suivi par Iron Man 232 (cf Scarce 16, Notes de Lecture) : pour Barry Smith un travail à cadence réduite, pour les lecteurs un plaisir chaque fois renouvelé. Que demander de plus ? Et encore, nous ne vous avons pas parlé des quelques couvertures qui viennent émail 1er une carrière aussi riche que rare... Cherchez bien dans vos collections (ça commence avec Captain Marvel 11 -reprise par Lug pour frtervel 13, ça continue avec Marvel Treasury Edition une des rééditions de "Red Nails"- et ça se poursuit jusqu'à de récents numéros de X-Men et de Mutants). Bon courage...!

Pourtant, dans les "milieux informés" (comme aurait dit quelqu'un), des bruits circulent, Barry Smith ne serait pas le paresseux qu'il semble être : il serait contraint de conserver pour lui de nombreux (??) travaux n'intéressant pas les grandes compagnies (!!). Allez, Barry, il n'y a pas que Marvel et DC. De plus, il ne voudrait plus travailler pour la Marvel, et à cela, deux raisons : étant un homme complet, Barry Smith désire prendre en charge la totalité des tâches graphisme et encrage mais aussi mise en couleurs et élaboration du scénario- et, enfin, il aurait été très échaudé par le refus de Marvel de publier ses derniers travaux, Jugés trop violents. Alors, ami lecteur, heureux d'appartenir au "milieu informé" ?

Mais ce n'est pas tout car nous pourrions peut-être avoir un jour la chance de lire une partie totalement nouvelle de son oeuvre : l'adaptation en BD de Robin Hood, projet qui lui tient tout particulièrement à cœur (et dont on ne comprend pas qu'aucun éditeur ne se soit déjà porté acquéreur ! ).

En attendant, et pour terminer sur une bonne nouvelle, les aficionados de Barry Smith pourront se contenter de la réédition de l'intégrale des Conan que ressort Marvel dans un magazine luxe, grand format, noir et blanc et avec des couvertures inédites (splendides comme toujours), Conan Saga (Barry Smith dans les numéros 1 à 9).

Georges SIMONIAN

CHRONOLOGIE DE CONAN THE BARBARIAN

Titre

Réf. françaises

Encreurs

1 The Coming of Conan

Eclipso 42

 

2 Lair of the Beast

Eclipso 45

S.Buscema

3 The Twilight of the Grim Crey God

Eclipso 46

S.Buscema

4 The Tower of the Elephant

Eclipso 50

S.Buscema

5 Zukala's Daughter

Eclipso 51

Glacoia

6 Devil-wings over Shadizar

Eclipso 52

S.Buscema

7 The Lurker within

Eclipso 53

S.Buscema/Adkins

8 The Keepers of the Crypt

Eclipso 54

Sutton/Palmer

9 The garden of fear

Eclipso 55

S.Buscema

10 Beware the Wrath of Anu

Eclipso 58

S.Buscema

11 Rogues in the House

Eclipso 59

S.Buscema

12 The Dweller in the Dark

L'Inattendu 8

Smith

13 Web of the Spider-God

L'inattendu 8

S.Buscema

14 A Storm Called Stormbringer

L'Inattendu 9

S.Buscema

15 The Green Empress of Melniboné

L'Inattendu 9

S.Buscema/Smith

16 The Frost Giant's Daughter

Dracula 17

Smith

19 Hawks from the Sea

Adkins

20 The Black Hound of Vengeance

Conan 2

Adkins

21 The Monster of the Monoliths

Conan 2

S.Buscema/Adkins

23 The Shadow of the Vulture

Conan 3

Adkins/Stone

24 The Song of Red Sonja

Conan 3

Smith

ASTONISHING TALES

N° Titre

Réf. françaises

Encreur

3 Back to the Savage Land

Etranges Aventure 47

Grainger

4 The Sun-God

Etranges Aventure 47

Grainger

5 Rampage!

Etranges Aventure 47

Giacoia

6 'ware the winds of Death

Etranges Aventure 48

Everett

10 To End In flame!

Etranges Aventure 50

S.Buscema

AVENGERS

N° Titre

Réf. françaises

Encreur

66 Betrayal

Les Vengeurs7 1

Shores

67 We Stand at Armageddon

Les Vengeurs 1

Klein

98 -Let Slip the Dogs of War

Thor 25

S.Buscema

99 They First Make Mad

Thor 26

Sutton

100 Wathever Gods There Be

Thor 26

Smith/Sinnott/Shores

Le numéro suivant voit l'arrivée de John Buscema et la fin de la saga de la Guerre Sainte du Tarim entre Makkalet et Turan.
Savage tales 2-3 (Red Nails) sont publiés en couleurs et sous le titre "Les Clous bouges", par les Humanoïdes associés (1976 adaptation de Philippe Manœuvre). L'année suivante, le même éditeur et Manœuvre récidiveront avec l'album "Les Faucons des Mers" (Conan 19 à 21), en noir et blanc cette fois. La présentation de ces deux albums en format géant (25) n'apporte rien à la version originale en détruisant plutôt la finesse du détail (dommage car la traduction de Manœuvre est nettement supérieure à celle d'Aredit vérifiez avec Conan 2 paru début 1978).

Notons enfin que tous les épisodes dessinés par Barry Smith seront réédités, en couleurs, dans sa collection Pocket Color (Conan 1 à 4).